M. Foret a partagé des souvenirs de famille avec les troisièmes
Ce vendredi 17 septembre, M. Foret a partagé avec nous des souvenirs de ses deux grands-pères au sujet de la Seconde Guerre mondiale.
Les deux grands-pères de M. Foret ont en effet vécu la guerre de deux manières différentes.
*Son grand-père maternel l’a vécu en tant que STO (Service du Travail Obligatoire, une réquisition des jeunes français pour aller travailler des les usines allemandes) en Allemagne.
* Son grand-père paternel l’a vécu en tant que civil en subissant l’Occupation allemande.
Deux manières de vivre la guerre …
Son grand-père paternel s’est chargé, comme les agriculteurs du coin, de déblayer la ville de Mayenne après les bombardements américains à l’été 1944. C’est ce qui explique que M. Foret possède une douille anti-char américaine, retrouvée par son papy au moment du déblayage (avec ses 8 chevaux de trait !).
Les Américains ont bombardé Mayenne dans la nuit du 8 au 9 juin 1944 pour affaiblir les Allemands et libérer la Mayenne. M. Foret nous a raconté que les Américains ont pilonné une large zone, détruisant l’hôpital et menaçant la ferme de ses grands-parents.
Les Allemands avaient saboté le pont pour empêcher l’avancée américaine. C’est grâce au soldat Mac Racken (25 ans), qui s’est sacrifié pour couper les fils des explosifs, que le pont a été sauvé et que les Américains ont avancé vers Le Mans, puis Paris.
Le grand-père paternel de M. Foret n’est pas parti au STO car il avait 9 enfants.
Le grand-père maternel de M. Foret est quant à lui parti 6 ans en Allemagne pour le STO, jusqu’en 1946. Au moment de son départ, sa femme était enceinte d’une petite fille (la maman de M. Foret). A son retour, il parlait couramment allemand, et a même sympathisé avec Fritz, un jeune allemand qui travaillait à la ferme en son absence. Parti en 1947, celui-ci est revenu en 1976 : les deux amis ne se sont alors plus perdus de vue.
L’aîné des 9 enfants, Georges (22 ans), n’est pas non plus parti au STO. En effet, son père (Georges lui aussi) avait déjà perdu ses 3 frères aînés, gazés à Ypres en 1914-1918, et ne voulait pas que ses fils partent à la guerre. Il a caché son fils aîné dans une forêt (avec Eugène Barbedette de Pontmain). Ils ont survécu en faisant du charbon pendant 5 ans et grâce au ravitaillement .de Georges une fois par semaine la nuit. Il était le seul à savoir où il était. C’est aussi une forme de résistance.
(Affiche pour le STO, http://www.ac-grenoble.fr)
Meslay dans la Seconde Guerre mondiale
Après nous avoir parlé de la libération de Mayenne, M. Foret a expliqué quelques événements qui se sont produits à Meslay pendant la WW2.
Ainsi, il a évoqué le camp d’internement d' »Indésirables » (le nom donné aux anti-nazis réfugiés en France dès 1939 et internés car il « gênait » l’opinion publique) à Meslay. Il a raconté, parmi les 3000 internés, l’arrivée de 1500 intellectuels juifs (des médecins, des musiciens, des avocats, uniquement des hommes) qui avaient fui l’Allemagne avant le début de la guerre. Passés en transit par le stade Colombe, ils ont été envoyés vers le sud et ont débarqué à la gare du Bignon-du-Maine en septembre 1939.
D’abord parqués au Chateau des Rochères à partir du 18 septembre, ils ont ensuite été envoyés à la ferme de la Poterie, à la Cropte, parce que leurs baraquements étaient pris par la boue. Ils y sont restés près de 9 mois. Un film (le seul film sur un camp d’internement français) a été tourné et est visible ici :
Les internés ont été aidés et nourris par les habitants du coin. Pour passer l’hiver, ils ont détourné un convoi de charbon, qu’ils ont transporté du Bignon à la Poterie avec des brouettes empruntées aux agriculteurs du coin. Les. Habitants les nourrissaient.
Des anecdotes très précieuses
M. Fôret a ensuite raconté quelques anecdotes sur la Libération et que ses aieux ont parfois vécu : les premiers chewing gums, les tablettes de chocolat, la récupération par les agriculteurs des engins militaires en panne laissés par les Américains (d’où les premières botteleuses mécanisées), les combats d’avions (dont deux sont tombés respectivement à Bazougers et à Entrammes), l’arrivée du jazz en France …
Notre professeur de musique a terminé sa très belle présentation par un souvenir personnel.
Lorsqu’il habitant Saint Denis du Maine, à ses débuts au collège, il a beaucoup discuté avec son voisin, Roger Illand. La suite, c’est l’intéressé qui la raconte la mieux : «
Je faisais de la peintureà l’étage avec mon beau frère (allemand). Roger est monté dans la maison, est s’est tétanisé quand il a vu Axel. Il a expliqué ensuite avoir reconnu la langue allemand, et qu’il ne lui avait jamais dit qu’il était sorti des camps (cela en montrant son bras). Rentré à 18 ans, il en est ressorti avec un poids de 35 kg. Il faisait des cauchemars et revoyait ce qu’il avait vécu. Il a réussi à discuter avec Axel, qui lui a expliqué que lui aussi son grand-père avait été tué par les Américains. Roger est décédé il y a 5 ans, était un des derniers survivants. Je me rappelle qu’il est tombé au sol quand il a vu sa photo dans le mémorial des déportés à Mayenne. »
Nous remercions très sincèrement M. Foret d’avoir pris le temps de nous raconter un morceau de son histoire personnelle. Ce fut un très beau moment, qui en a fait frissonner plus d’un.